Erik, coeliaque depuis l’enfance et chef étoilé
Erik, c’est qui ?
Moi c'est Erik, 46 ans, papa de 2 grands enfants qui vivent avec leur mère. Je suis né à Château-Thierry, j'ai grandi à Orléans, fait mes études hôtelières à Blois, puis j'ai travaillé uniquement dans les restaurants étoilés à Paris. Je suis ensuite devenu prof de cuisine et j'ai monté mes ateliers culinaires. Aujourd'hui je me consacre principalement à la boulangerie sans gluten. Le sport est ma soupape de sécurité. Je l'ai pratiqué à un niveau national en natation. J'ai eu la chance de pratiquer tous les sports que je voulais grâce à mon père qui travaillait dans ce milieu. J'ai plus de 15 ans de pratique de taekwondo, dernièrement j'ai pratiqué du ju-jitsu. Je fais de la musculation, course à pied et un peu de vtt.
Et le gluten, dans tout ça ?
J'ai été diagnostiqué coeliaque très jeune, à l'âge de 2 ou 3 ans. Dès l'introduction d'une alimentation solide, j'ai commencé à dépérir. Ma grand-mère avait dit à mes parents cette phrase frappante: "ce petit est en train de mourir". Ce n'était pas exagéré. Un professeur à l'hôpital américain de Reims a émis l'hypothèse d'une intolérance au gluten. Une biopsie jéjunale, dont je garde des souvenirs traumatisants, a confirmé que j'étais atteint de la maladie coeliaque. Un coup de massue pour mes parents, car l'alimentation sans gluten n'était pas connue à cette période. Mes parents faisaient des kilomètres pour m'acheter les quelques produits sans gluten disponibles dans une seule boutique. Ma mère redoublait d'efforts et d'ingéniosité pour me faire des gâteaux, crêpes, gaufres et plats sans gluten pour que je me sente comme les autres enfants et surtout comme mon frère qui lui mangeait normalement.
Le plus dur, c’était quoi ?
Le plus dur était le regard des autres qui me trouvaient bizarre. Les sorties aux restaurants compliquées, car obligé de me restreindre aux mêmes plats. Ceci dit, mes parents pensaient me faire plaisir, en m'autorisant à manger une pizza, une fois par mois. C'était un bonheur absolu, et une frustration de ne pas pouvoir en manger plus souvent, le comble pour quelqu'un d'origine italienne. Je mangeais cette pizza tout en sachant que je serai malade le lendemain (ATTENTION dans le cas de la maladie coeliaque, ceci est une très mauvaise idée). Dans mon malheur, j'ai eu de la chance car ma mère ne cuisinait que des produits frais, des produits du jardin. Jamais de conserve ou de plats préparés. C'est sans doute cette éducation du goût qui m'a donné envie de devenir cuisinier.
En grandissant, c’était comment ?
À l'adolescence j'ai intégré un lycée hôtelier, pour devenir cuisinier. Profession que je voulais faire depuis l'âge de 6 ans. Adolescence oblige, j'ai mis mon régime de côté, de peur de me sentir encore différent et "bizarre" aux yeux des gens. Peu de personnes connaissaient cette maladie. Et moi je multipliais les infractions en mangeant quasiment normalement et sans prêter attention aux symptômes que j'avais. J'ai ensuite travaillé dans les restaurants les plus prestigieux, tout en continuant à manger normalement. Profession oblige, je goûtais tous les plats. J'avais pourtant des maux de ventre, une grande fatigue, des problèmes de peau, un poids de 68 kilos pour 1m82 et je mettais tout ça sur le compte du stress et des horaires de travail.
Je suis ensuite devenu professeur de cuisine et mes symptômes se sont amplifiés. J'ai perdu du poids de nouveau, eu des problèmes intestinaux, des diarrhées. Mon médecin m'a alors rappelé à l'ordre en me demandant de reprendre un régime strict. Ce que j'ai fait. J'ai repris du poids, mes soucis intestinaux ont disparu, ma fatigue aussi. Je fais 83kg pour 1m82 et je continue à faire 8 à 10h de sports par semaines.
Aujourd’hui, sans gluten et cuisinier ?
Ma gestion du sans gluten est facile. De par ma profession, je cuisine uniquement des produits frais. Je sais décortiquer les étiquettes et les ingrédients et je ne commets aucun écart. Mes enfants vivent avec leur mère, ils ne sont ni intolérants, ni sensibles au gluten, mais avant ils consommaient aussi de temps en temps des produits sans gluten. Ils savent ce que je peux manger ou pas. Les sorties chez les amis sont plutôt simples, car tous connaissent ma maladie et ils font de réels efforts lors des repas et s'aperçoivent que le sans gluten n'est pas si compliqué surtout si on cuisine.
Au restaurant, c'est différent. Mes collègues restaurateurs manquent cruellement de formation et d'information concernant cette maladie. Je me bats, pour leur faire prendre conscience de la gravité de cette maladie s’ils ne font pas attention. Je demande systématiquement la carte des allergènes en précisant que je suis vraiment atteint de la maladie coeliaque et que ce n'est pas un caprice. J'aimerais aussi que le sans gluten se démocratise plus en France, comme cela l'est dans beaucoup de pays où j'ai voyagé et surtout que les coûts des matières premières baissent.
Pour conclure, je suis cuisinier de formation, pâtissier par passion et boulanger par conviction. Je suis coeliaque et je le vis très bien.
Pour plus d’infos sur Erik, c’est par ici : https://www.lesateliersderik.com/